Bulletin 20 / Juin 2003

Famille Sagne

Famille Sagne, communière de La Sagne et de La Chaux-de-Fonds; bourgeoise de Valangin

Pierre-André Borel

Guillaume, fils d’Othenin Perrenoud, franc habergeant de La Sagne; laboureur, s’établit à La Sagne chez son beau-père pour reprendre le maix de famille. Ceci par son mariage matrilocal avec Pernette, fille de Jehan Sagne-Touchenet. Ces raisons font que leurs enfants portent le patronyme de leur mère. Parmi eux il y a des filles et quatre fils Sagne :

  • Blaise, cité dans un acte notarié du 12 octobre 1544
  • Guillaume, cité le 13 septembre 1549
  • George, ligne directe
  • Pierre, cité le 1er mars 1554

George Sagne Touchenet alias Perrenoud, fils de Guillaume; communier de La Sagne; quitte la vallée pour s’établir, avec ses frères, au village de La Chaux-de-Fonds en la mairie du Locle. En date du 6 janvier 1530 passe devant le commissaire sa reconnaissance de biens. Il est dit encore vivant en 1554. Il épouse Jaqua Brandt dit Grieurin, fille de Jehan communier du Locle et bourgeois de Valangin. Le 16 avril 1547 George vend au nom de Jaqua sa femme, une terre sise au Locle (acte de Blaize Duboz notaire). Ils sont les parents de six fils :

  • Esayé
  • Abram
  • George
  • Pierre, ligne directe
  • Guillaume
  • Jaques, meurt avant 1596

Leur père, George, teste le 21 octobre 1596 en faveur d’une partie de ses fils, soit : Esayé, Abram, Pierre, George et ses petits-enfants les enfants de feu Jaques.

Pierre Sagne Touchenet, fils de George; possède des biens fonciers et héritage de famille à La Sagne. Il s’installe comme « hoste » à l’enseigne de La Fleur de Lys (armes de la maison des Orléans-Longueville princes de Neuchâtel) à La Chaux-de-Fonds. Village où il meurt le 28 octobre 1681 et est enterré le 30 de ce mois. Il est père de :

  • Daniel, ligne directe

Daniel Sagne, fils de Pierre. En 1662, propriétaire d’une maison à La Vieille Chaux au Grand Quartier du côté vent du chemin qui conduit à l’église de La Chaux-de-Fonds, « hoste public » à l’enseigne de la Fleur de Lys. Il « reconnaist » aussi posséder un maix de terre à La Joux Perret avec maison sus baties; une autre maison avec four à pain Dernier Moulin; champs, prés et pastures à La Sombaille; Aux Coeudres de La Sagne, aux Bulles; cet homme aisé possède 43 faux de terre et 3/4 pour lesquelles le cens se monte à 4 deniers lausannois par faulx. Le 21 mars 1666, membre du Conseil de commune, il amodie son maix Le Cernil Perin gisant au Grand Quartier et sur celui de La Sombaille. Le 30 novembre 1668, vend un champ au Valanvron. Le nom de sa femme ne nous est pas connu mais elle est mère de

  • Pierre, ligne directe

Pierre Sagne, fils de Daniel; communier de La Chaux-de-Fonds, bourgeois de Valangin; « hoste public » à La Fleur de Lys. En 1662 il reconnaist les biens personnels de sa première épouse mais ne peut pas encore reconnaître ses biens propres car son père vit encore; le 18 juillet 1681, il passera un accord notarial pour l’héritage de feu Pierre Huguenin le frère de sa seconde femme. Susanne Tissot Daguette fille de George, du Locle, lui donne une fille prénommée Judith. Veuf, Pierre épouse en secondes noces Susanne Huguenin, fille du justicier Josué Huguenin vivant à La Sombaille. Leur fils :

  • Daniel, ligne directe

Daniel Sagne, fils de Pierre, naît à Neuchâtel le 16 décembre 1686. Communier de La Sagne et de La Chaux-de-Fonds, bourgeois de Valangin. Paroissien des Brenets lieu de sa résidence. Possède une belle fortune; il meurt peu avant le 1er juin 1741, date du partage de ses biens entre ses héritiers. Judith Malenjoye die Savoie du Locle, sa veuve, le 21 février 1741, relâche sa part de la succession de son mari en faveur de ses enfants. Sa part est estimée à 15.000 livres or faible monnaye; par contre, elle demeure en sa maison du bas du village des Brenets rière le Pré Nogé près du Pré au Lac, comprenant aussi prels, closel, verger, jardin et rivière. Les fils s’engageront à soigner leur mère et à lui donner le lait d’une vache.

Le 10 may 1742 Judith échange une terre labourable à La Pointe du Crest quartier du Chasteau Neuf mairie du Locle contre un cernil boisé au crest du Locle quartier des Esplatures. Assistée d’Abram son fils elle s’en dessaisira le 20 mars 1743 pour 425 livres or. A Daniel son mari elle avait donné plusieurs enfants dont trois fils :

  • Pierre, communier de La Sagne et de La Chaux-de-Fonds, bourgeois de Valangin; élevé aux Brenets sa paroisse il prend sa Première Communion le 18 avril 1726; décèdera en 1741. Aux Brenets, le 22 septembre 1736, il a épousé Esther Othenin-Girard fille de Moÿse, du Locle, dont :
    • Daniel baptisé le 4 mai 1738
    • Abram baptisé le 3 mai 1739
    • Marie Esther née posthume, baptisée le 9 juillet 1741
  • Abram, reçoit une procuration de son frère Daniel pour gérer sa part d’héritage, datée du 1er juin 1741.
  • Daniel, ligne directe.

Descendance de Daniel Sagne en Rhénanie

Par Margret Schopen présidente du Cercle généalogique de Mönchengladbach et Rheydt de 1982 à 2002; consultation des documents aux Archives de Brühl (Köln).

Daniel Sagne, fils de Daniel. Date de naissance inconnue car le registre a disparu dans l’incendie de la cure des Brenets. Il émigre aux Pays-Bas. De là, ne pouvant se déplacer pour la succession de son père, il envoie une procuration prouvant son absence du pays natal; signalant qu’il occupe alors le poste très important de receveur de la perception des impôts de Leurs Hautes Puissances les Etats Généraux. Il fonctionne dans la province du Limbourg. Auparavant il était officier du Trésor à La Haye, c’est à dire Homme de Chambre ou Chambrier. C’est à Roosteren au Limbourg qu’il décède le 1er février 1766 à l’âge de 54 ans, laissant une veuve âgée de 47 ans et un fils unique âgé de 8 ans (?). En considération de sa notabilité, il fut inhumé dans l’église réformée de Steevensweert. Roosteren est proche du bourg de Roermond, tous deux dans le voisinage de Steevensweert. Daniel avait épousé Susanne Catherine Huguenin, du Locle. Leur fils : 

  • Abram, ligne directe

Abram Sagne dit aussi Abraham, fils de Daniel; né en 1739. Adulte, il quitta vraisemblablement les Pays-Bas avec sa mère; ils s’installèrent en Prusse rhénane. C’était sous le règne de la dynastie royale des Hohenzollern également princes de Neuchâtel. Il vit à Millich village près de Rathhesin dans le Rheinland non loin d’Aix-la-Chapelle. Dans un certificat de baptême il est dit être boulanger et Ackerer ce qui signifie qu’il possède un domaine agricole. Malgré les recherches aux Pays-Bas et en Allemagne l’endroit et chez qui Abraham a fait son apprentissage de boulanger n’ont pas été découverts. Par trois fois, Abraham quitte Millich pour se rendre dans sa patrie la principauté de Neuchâtel cherchant à se renseigner et réaliser l’héritage de son grand père décédé aux Brenets en 1741; son père avait confié sa part à un notaire de la famille pour qu’il la gère. Après enquêtes lors de son troisième voyage Abraham découvre que ce fort peu scrupuleux notaire était un filou, parti aux Amériques avec la fortune de son client.

L’acte de décès d’Abram Sagne, enregistré par le pasteur de Millich signale qu’il est mort à 74 ans en 1813. Abram avait épousé, dans la paroisse réformée de Hückelhoven, en 1777, Catharina Elisabeth Jansen, née au dit lieu en 1740; décédée à Millich le 8 août 1839 !!

Encore aujourd’hui Millich dépend de l’Eglise réformée évangélique de Hückelhoven dans le district d’Erkelen, souscription d’Aix-la-Chapelle.

Lors des persécutions au royaume de France, de nombreux huguenots ont émigré aux Pays-Bas et en Rhénanie. Dans les Cévennes, ils plantaient, devant leur maison, trois arbres afin de signaler à leurs coreligionnaires leur appartenance au protestantisme; cette coutume s’est implantée dans les pays d’accueil, même les autochtones les imitères. A Millich, Abram Sagne planta, devant sa maison, deux tilleuls et un châtaignier.

A la fin du XVIIIème siècle le presbytère de Hückelhoven brûla et les archives d’église disparurent dans les flammes.

Abram et Catharina ont eu un seul fils :

  • Ludwig, ligne directe.

Ludwig Sagne fils d’Abram naquit à Millich le 4 mai 1778; de lui descend la lignée des :

Sagne établis en Allemagne.

Ludwig était fier de ses origines francophones et signait quelquefois ses lettre Louis Sagné, avec un accent aigu sur le e, pensant faire plus français. Cette forme Sagné est encore utilisée de nos jours par les officiers d’Etat civil pour sa descendance.

Ludwig est mort à Wassenberg le 4 juillet 1865. Dans l’ancien du village on a conservé sa pierre tombale à la place où il fut enterré. Il avait épousé Agneta Catharina Weidmann fille de Johann Peter, et de Petronella Keller; née à Hilfahrt le 8 décembre 1789; décédée à Millich le 20 février 1839.

Agneta et Ludwig sont les trisaïeux de Madame Margret Schopen. La grand’mère de Madame Schopen, Pauline Lenssen, était l’arrière-petite-fille d’Abram Sagne. Pauline était née dans la maison de famille à Wassenberg devant laquelle trois beaux arbres donnent toujours leur ombre agréable lors des étés rhénans et rappellent, en 2003, cette ancienne coutume.

Un Noël de guerre vécu par Margret Schopen :

« Lors de la bataille des Ardennes, ma mère et moi avions quitté précipitamment Aix-la-Chapelle pour nous réfugier dans une maisonnette isoée dans la forêt. En ce 24 décembre 194, notre repas de veille se composait de pommes de terre en robe des champs. Tout à coup nous sursautons en entendant des voix d’homme derrière notre porte. Deux jeunes parachutistes anglais perdus dans la nature nous demandaient l’hospitalité pour la nuit, l’un d’eux étant blessé. Sachant les risques que nous encourons nous ne refusons pourtant pas de les accueillir. Nous chantons avec eux des cantiques de Noël lorsque l’on frappe de nouveau à la porte. Impossible de cacher nos hôtes… Ce sont deux jeunes soldats allemands. Ma mère les reçoit, leur demande de déposer leurs armes devant la maison, leur raconte ce qui se passe … » … ma fille et moi remettons nos vies et celles de nos hôtes entre vos mains, ou plutôt vos consciences … » Emus, sans répondre, ils entrèrent, joignirent leurs voix aux autres en chantant les Noëls européens; nous vivions tous les six un Noël exceptionnel. Les 4 « ennemis » se partagèrent le seul lit disponible et le matin de Noël les Allemands conduisirent par des sentiers détournés et sûrs leurs nouveaux amis afin qu’ils puissent retrouver leurs lignes sans danger. »

(traduction par P.-Arnold Borel)