Bulletin 26 / 2005

Marguerite de Laviron dite la bonne dame de Travers

par Pierre-Arnold et Jacqueline Borel

Damoiselle Marguerite de Laviron est fille de noble Jean. Dame de Trévillers et d’Andrisans et austres lieux. Née en 1525 ou 1526; décédée plus que centenaire en 1627. L’histoire place cette douairière bourguignonne parmi les femmes de tête du pays, elle a conservé jusqu’à sa mort la régence de la seigneurie avec la plus grande capacité. Trois portraits d’elle font ressortir sa personnalité. L’un, conservé durant de nombreuses années au château de Vaumarcus, la représente jeune femme en Diane chasseresse, portrait mythologique selon la mode répandue à l’époque; l’autre, en femme dans la quarantaine, un missel à la main. Ce dernier tableau est déposé dans le fonds de famille Borel-de Rougemont au Musée régional du Val-de-Travers à Môtiers. Le troisième montre une vénérable et respectable dame âgée, coiffée de façon austère (photo ci-dessus). D’abord au château de Travers, ce portrait est donné à la bibliothèque de Neuchâtel par la veuve du dernier seigneur de Travers madame de Sandoz née Borel.  Actuellement il se trouve au Musée d’Art et d’Histoire de Neuchâtel. La bonne dame de Laviron vécut les quarante ans de son veuvage au château de Travers; elle y connut la douleur de se voir précédée dans la tombe par son gendre Ulrich von Bonstetten en 1608 et par son unique fille Anne en 1625.

…. »..Dame Marguerite étoit non seulement pieuse et bonne envers ses sujets mais encore capable et plus éclairée que les seigneurs du temps; elle avait soin des siens et sa sollicitude allait aussi à ses sujets, les villageois et paysans
censiers de la montagne… »

A propos du vin, on sait que l’abus en était courant; la dame de Travers s’en préoccupait car elle avait à cœur la santé et le bien-être de ses sujets. Dix cabarets pour Travers et Noiraigue favorisaient l’ivrognerie. Par son action et la collaboration du pasteur « ..scientifique » Jaques Sandoz, ils ont été réduits à cinq !!

Pour guérir les maladies Madame la baronne préparait des simples pour les tisanes, les herbes savamment mélangées se firent une réputation au Vallon sous le nom de « Thé de Buttes ». Le tri et le séchage de ces plantes bénéfiques l’occupait longuement. 

La baronne offrait aussi de magnifiques réceptions; il y en eut une sur la terrasse au-devant du château de Travers pour le prince de Neufchastel et Vallangin Henri II d’Orléans-Longueville, il y but à la santé de la vénérable dame son hôtesse. 

 Le 19 septembre 1562, elle épouse noble seigneur Jehan III de Neuchâtel seigneur de Vaulmarcus et de Travers; il est fils de Lancelot. Il descend de la branche bâtarde des comtes de Neuchâtel. C’est en 1559 qu’il reçoit la seigneurie de Vaumarcus et en 1585 celle de Travers qu’il hérite de son frère Andrey. Jehan III avait reçu son éducation à la cour de Bourgogne aussi faisait-il volontiers des séjours sur les terres de sa femme. … »..Jehan III signour de Vaulmarcus ayant adopté avec conviction la Réforme revint au papisme par son mariage car cela lui apportait une sensible amélioration à ses finances familiales 226.000 livres en biens allodiaux. Il put achever la construction du château de Travers. Au dessus de la porte il fait creuser un niche pour la figure de saint Cosme; il met aussi des girouettes sur le toit, forgées aux armes de la maison de Neufchastel, ainsi que sur la cheminée.. » » comptes du fief de 1561.

La maison seigneuriale de Travers comprenait une salle des chevaliers orientée au nord. Au temps de la chasse, les soirs d’automne, elle résonnait du joyeux vacarme de ses hôtes venus manger chevreuils et autres gibiers, largement arrosés d’hypocras d’Auvernier. Il y avait les sires de Trévillers et un Guérard von Wattenwyl bourgeois de Berne. Vers 1569, Jehan s’occupe aussi de la reconstruction du temple gothique de Travers et d’y établir comme pasteur résidant Olivier Merienne. Jehan III décède en 1587.

Marguerite et Jehan ont une fille Anne de Neuchâtel, dame de Travers, baronne de Vaumarcus; née en 1564.

Décédée en 1608. Son époux Ulrich von Bonstetten est bourgeois de Berne, né en 1548 et fils de noble Johann Jakob. Ulrich passe sa jeunesse à la cour de la maison de Savoie. Il devient ambassadeur de Leurs Excellences de Berne auprès du roi Henri IV de France; il est seigneur et châtelain de Jegenstorf.

Anne et Ulrich sont parents de huit enfants. Ils comptent de nombreux descendants dans les familles neuchâteloises actuelles.

Noble Jehan de Laviron fils de Pierre, chevalier, seigneur de Laviron, Trévillers, Bavans, Sancey dit Sancy, et Andrisans. Il est né en 1509. En 1541 il achète à François de Gevigney ses propriétés et chevances de Cuse, Nans et Andrisans. Le baron de Laviron introduit en sa glèbe la culture du maïs appelé bled des Indes. Ses serfs-paysans en font des gaudes, sortes de bouillies. Les livres de comptes du château de Laviron sont encore les plus précieux documents sur l’Histoire des Montagnes du Doubs au XVIème siècle.
Toute cette contrée a été ravagée par la Guerre de Trente ans. Jehan, décédé en 1570 est enterré dans l’église de Sancey le Grand.

Vers 1540 il a épousé noble Marguerite d’Arbois fille de Jean, et d’Isabelle Mandresi. La seigneurie d’Andrisans ou Adrisans qu’elle apporte en dot consiste en 9 pièces de terres, 5 de prés et deux sujets de serve condition: François Rouge et Pierre Jacot avec leurs familles, leurs maisons et leurs maix.

Enfants:

  • Marguerite ligne directe
  • François il semble être défunté jeune car Marguerite sa sœur est seule pour représenter la famille Laviron au château de Belvoir lors du serment de vassalité à Evandelin Symon de Cusance baron de Belvoir chevalier de Saint George. Elle est alors citée parmi un nombre considérable de chevaliers, écuyers, tenant un rang marquant parmi les familles de noblesse féodale des Montagnes de Franche-Comté

Pierre de Laviron est fils de noble Antoyne. Décédé en 1526. Propriétaire de la seigneurie de Bavans canton de Montbéliard, domaine comprenant un village et son moulin. ..dans l’actuelle église de Sancey en la baronnie de Belvoir reposent les sires de Laviron.  L’église primitive a été partiellement détruite lors des invasions du roi Louys XI de France et des mercenaires suisses. Sous la chaire l’on remarque le fragment supérieur d’une dalle funéraire, en léger relief, laissant voir deux têtes sur des coussins, des tributs de leurs armes et, sur un cartouche, l’inscription suivante: « Cy git Pierre de Laviron et Jehan de Laviron son fils aussi escuyer, de leur vivant seigneurs à Adrisans, Bavans, Trevillers…lequel Jehan de Laviron décéda le pénultième jour d’aoust l’an mil cinq septante… auquels Dieu face païx, Amen.. » Les Laviron issus des comtes de Montbéliard en portent les armes brisées: » d’azur à deux barres adossées d’or, brisées en chef d’une croisette de même ».

Pierre épousa, le 5 de may 1507, damoiselle Jehanne de Trévillers fille de noble Jehan dit le Put, et d’Henriette de Pierrefontaine; Jehanne étoit alors déjà veuve de Jehan de Courtelary en Erguel; dernière du nom de Trevillers elle apporte cette seigneurie à la maison de Laviron.

Ils n’ont qu’un fils Jehan ligne directe

Antoyne de Laviron fils de noble Jehan. Seigneur Franc-comtois, conseiller du duc de Bourgogne et écuyer de Thiébauld IX signour de Nuefchastel. Antoyne est cité en 1443 sur ses terres; ses armes portent « d’or à la fasse d’azur ». Il est père de deux fils

  • Pierre ligne directe
  • Oudot qui épouse, en 1480, damoiselle Marguerite de Belvoir; meurt avant 1506

Jehan de Laviron fils de Vuillemin de Naisey, homme lige du damisel Thiebauld seigneur de Belvoir. Pour sa maison forte de Laviron et ses dépendances en « homes », terres, domorances et corvées, Jehan, comme toute la noblesse comtoise de son temps, apprécie l’organisation et la prospérité apportées par les ducs de Bourgogne. En 1394 il épouse damoiselle Simmonette de Pierrefontaine fille de Jehan Purnelle escuyer. Ils ont:

  • Henry cité en 1380, meurt en 1443.
  • Antoyne ligne directe

Vuillemin de Naisey fils du sire de Guyon. De lui descend la famille de Laviron. Le château-fort de Vuillemin, bâti sur un rocher, est appelé aussi Andernach. Il est homme lige du seigneur de Belvoir. Acte de 1279: « Je, Vuillemin escuyer de Laviron fils de moussu Guyon chevalier de Laviron fais scavoir à tous ceux qui veiront et oirront ces présentes lettres et di es cognais au lict la mort que quand que j’ay doi avoir ne puis à Laviron et à Battenaut et en territoire en prés champs bois hommesserfs et autres meinières et dou fie lige moussu de Belvoir jusques à tant que… an 1279….temoins Estain curie de Huanne, Guillaume curie de Laviron.

Vuillemin est père de trois fils:

  • Aymond
  • Renaud
  • Jehan ligne directe.

Noble Guyon de Naisey fils du sire Raimbold qui est filz de Robert II vivant en 1150 filz de Richard qui est fils de Robert I cité en 1050 premier du nom. Guyon vit au chastel féodal de Naisey, qui sera détruit par Louis XI roi de France.

La famille possédait l’obédiancerie du prieuré augustin dépendant de l’abbaye Saint Paul. En 1262, le chevalier Guyon fit hommage au baron de Belvoir et au comte Amédée de Montfaucon pour la possession qu’il tenait de ses parents à Laviron et à Bettenans. Il s’engageait aussi à faire la garde pendant quarante jours l’an au chastel de Belvoir. Son fils Vuillemin ligne directe fit le même hommage, en 1279.

Pour plus de détails consultez les ouvrages

  • « notice historique sur la seigneurie de Travers » par Jules Sandoz-Travers, ouvrage publié par la Société d’Histoire du canton de Neuchâtel en 1881.
  • « la famille de Rougemont communière de Saint-Aubin, Sauges, Noiraigue, Travers et Buttes bourgeoise de Neuchâtel quartiers du pasteur Henri Philippe de Rougemont 1839-1900 », tome III p.240 par P.-Arnold et Jacqueline Borel.