Bulletin 34 / Avril 2008

La famille Breguet, bourgeoise de Neuchâtel, une famille d'horlogers et d'inventeurs d'origine neuchâteloise

par Pierre-Arnold Borel

A. Descendance d'Abram-Louis

1. Abram-Louis Breguet

Abram-Louis Breguet, fils de Jonas-Louis

Bourgeois de Neuchâtel, né à Neuchâtel, le 10 janvier 1747, ville où ses ancêtres sont déjà fixés en 1420. Il meurt en 1823.

Orphelin de père â l’âge de onze ans, Abram-Louis est élevé par son parâtre Joseph Tattet, des Verrières, qui a un comptoir d’horlogerie à Paris; il met Abram-Louis en apprentissage chez un horloger de Versailles. Le jeune homme profite des conseils et de  l’enseignement de ses maîtres même si, dans son enfance, rien n’annonçait qu’il deviendrait un horloger prestigieux.

Abram-Louis a en 1762, comme modèles, les remarquables artisans dont le roi s’entourait. Modèles qu’Abram-Louis surpassa puisque, au XXème siècle la Suisse et la France revendiquent âprement sa personnalité. Breguet, déjà remarquable horloger, se rend à Londres où il travaille assez longtemps, puis s’installe définitivement à Paris, au 51 du quai des Morfondus qui est aujourd’hui 39, quai de l’Horloge.

Abram-Louis Breguet perfectionne la montre à mouvement perpétuel, invente le tourbillon en 1781 et, en 1783, commence la remarquable montre dite de la reine Marie-Antoinette, son chef-d’œuvre.

Au XVIIIème siècle, Paris est la métropole culturelle et artistique de l’Europe. Très tôt, Breguet est remarqué et accède aux milieux bourgeois influents et à la cour de France, cercles d’où viendra sa clientèle. Mais, lorsque la Révolution éclatera, ces liens avec l’aristocratie se révèleront lourds de conséquence et il trouvera sage de quitter Paris; d’ailleurs, Marat l’avertit qu’il est devenu suspect et lui fournit même un sauf-conduit pour quitter la France. Breguet repense à ses origines suisses et, en juin 1793, accompagné de son fils et de sa sœur, se met en route pour la principauté de Neuchâtel, son pays natal.

Il s’installe au Locle, y monte et organise un atelier d’établissage, car, là, parmi de nombreux amis qu’il a dans le monde de l’horlogerie, il trouve des ouvriers qualifiés. La période locloise est bénéfique et la plus féconde de sa création. Il invente la montre à tact, permettant aux aveugles de lire l’heure au toucher et aux bien voyants de la connaître en pleine nuit. Il mit au point le «tourbillon» et inventa la «montre à souscription».

Il peut regagner Paris en 1795 en faisant valoir sa naturalisation française prenant date en 1792. Il se porte aussitôt acquéreur, pour environ 6000 livres or, de la maison qu’il occupait au quai de l’Horloge, appartenant aux Polastron, seigneurs de la Hilaire de Griprue au Languedoc et décrétée «bien national».

C’est à cette époque qu’il invente la «pendule et la montre sympathique». Il conserve aussi des relations avec Genève et le comté de Neuchâtel où il garde plusieurs fournisseurs d’horlogerie.

Des admirateurs de Breguet se manifestent: John Arnold, illustre chronométrier anglais, fait le voyage de Londres à Paris pour faire connaissance avec cet éminent confrère. Urbain Jurgensen, horloger danois établi au Locle, fait un stage à Paris chez Breguet.

Ferdinand Berthoud, originaire de Couvet, natif de Plancemont, membre de l’Institut de France, avait d’amicales relations avec son compatriote Breguet; il fréquentait les salons du quai de l’Horloge 39, et recevait les Breguet dans sa campagne de Groslay (entre Ecouen et Montmorency) aux confins du Vexin et du Valois.

Breguet, en 1815, est nommé, par le roi, horloger de la Marine et artiste adjoint au Bureau des Longitudes, puis, en 1816, membre de l’Académie des Sciences. Il enrichit la science de la mesure du temps appliquée à la navigation en mer, à l’astronomie et à la physique d’un nombre important d’instruments précieux: pendules astronomiques, horloges marines, chronomètres, et fait considérablement avancer l’industrie horlogère par ses nombreuses découvertes.

Abraham-Louis Breguet (Abram) épouse à Paris Cécile Marie Louise L’Huillier, fille d’Antoine, valet de chambre. Née le 8 février 1752, elle meurt le 13 mai 1780. Veuf, Abram-Louis ne se remarie pas et fait venir sa sœur Charlotte pour tenir son ménage.

Ses enfants:

  • Antoine Louis, né le 13 août 1776.
  • François-Louis, qui meurt en bas âge.
  • Charlotte, décède aussi bébé.

2. Antoine-Louis Breguet

Antoine-Louis Breguet, fils d’Abram-Louis Breguet.

Né le 13 août 1776. En 1792, fait un stage d’apprentissage à Londres chez l’ami de son père l’horloger John Arnold.

En 1793, Antoine-Louis se réfugie en Suisse, pays d’origine de sa famille et dirige le bureau et atelier Breguet d’établissage du Locle jusqu’en 1796, ceci avec des horlogers de premier ordre.

Plus tard, rentré à Paris, il s’associe à son père et bientôt lui succédera. En 1810, le 12 décembre il épouse Jeanne-Françoise Venture, née au Caire le 4 octobre 1774; elle mourra à Bourg-la-Reine le 20 janvier 1813.

Antoine-Louis Breguet, en septembre 1813, adresse une requête à la Chambre matrimoniale de Neuchâtel, rappelant qu’il est toujours d’ancienne bourgeoisie de cette ville, la priant de bien vouloir homologuer son mariage, évoquant les circonstances l’ayant empêché de procéder à sa célébration. Il demande aussi que ses deux enfants soient baptisés à Neuchâtel dans la foi protestante.

Enfants vivants reconnus par lui lors de son mariage:

  • Louis-François-Clément, né à Paris de 22 décembre 1804.
  • Louise-Charlotte-Clémentine, née à Bagneux le 30 avril 1810

3. Louis-François-Clément Breguet

Louis-François-Clément Breguet fils d’Antoine-Louis Breguet

Citoyen français, il est né et mort à Paris, 1804-1883. Il fait de nombreuses recherches pour perfectionner le télégraphe électrique.

Louis-François-Clément Breguet crée le télégraphe à lettres, à cadran ainsi que le mobile et il oriente sa demeure du côté des constructions électriques. Il s’occupe aussi avec succès de chronométrie et succède à son père dans son horlogerie. Le nom de «Breguet» devient synonyme de montre parfaite et toute montre de bonne qualité se nomme une breguet. Le parafoudre est aussi inventé par lui; il est, comme son père, membre de l’Académie des Sciences.

Louis-François-Clément Breguet, épouse Nelly Girardet, fille d’Eugène, artiste-peintre à Paris, originaire du Locle; Abram Girardet, célèbre éditeur libraire et dessinateur au Locle est son quintisaïeul.

Ses enfants:

  • Antoine, né et mort à Paris; 1851-1882. Physicien. Il est placé par son père à la tête des ateliers Breguet. Il étudie toutes les questions relatives à l’électricité. En 1875, il confectionne un anémomètre ingénieux, puis, en 1873, un téléphone à mercure.
    En 1883, après son décès et celui de son père, il se produit une scission entre les deux branches «horlogerie» et «électricité». Cette dernière se déplace à la rue Didot (Paris) et s’ouvre, ainsi, la Maison «Breguet Electricité» qui se fait une notoriété de premier ordre.
    • Louis Breguet, fils d’Antoine, est né à Paris en 1880. Il décède en 1955, à Saint-Germain-en-Laye. Pionnier de l’aéronautique. En 1909, il construit l’un des premiers avions et les premiers hélicoptères en France. C’est à bord d’un Breguet 414 que fut accomplie, en 1913, la première liaison Paris-New-York sans escale.

«A l’occasion du 700ème anniversaire de la Confédération helvétique, trois montres signées Abram-Louis Breguet ont été offertes par des mécènes au Musée National suisse du château de Prangins; trois perles de l’art horloger, parmi lesquelles: la montre de voyage de Napoléon Bonaparte …» (hebdomadaire «Coopération», no 37 du 12 septembre 1991) .

Deux cent quatre montres et horloges créées par Breguet ont été mises aux enchères le 14 avril 1991 à Genève. («Impartial» du 13 avril 1991) .

Ouvrages consultés

Alfred Chapuis: Abraham-Louis Breguet établisseur au Locle. «Revue de la Société suisse de Chronométrie», 1951.
Alfred Chapuis: Jean Paul Marat et Abram-Louis Breguet. «Revue de la Société suisse de Chronométrie».
NN: Le centenaire de Breguet.
«Journal suisse d’horlogerie et de bijouterie».
L’œuvre d’Abraham-Louis Breguet. Catalogue du Musée international d’Horlogerie, La Chaux-de-Fonds 1976.
Jean Pierre Matthey-Claudet: A propos d’Abram-Louis Breguet. Edition Chronometrophilia, no 30, 1991.

B. Ascendance d'Abram Louis Breguet

1. Jonas-Louis Breguet

Jonas-Louis Breguet fils de Louis (II) Breguet. Bourgeois de Neuchâtel, 1719-1758. Il épouse aux Verrières en 1745 Susanne-Marguerite Holle, fille de Jean-Jaques, capitaine aux Verrières.

Après leur mariage, il s’établissent à Neuchâtel, puis, vers 1751, ils retournent habiter aux Verrières où Jonas-Louis pratiquera le commerce de marchand épicier. A ce négoce, il ajoutera l’exploitation de l’auberge «Au Logis de la Croix Blanche» où s’arrêtent les  rouliers entre Suisse et Bourgogne.

«Relaissée» (veuve), Susanne-Marguerite vendra, en 1759, aux frères Tattet la maison du «Cheval Blanc» avec son droit d’enseigne. Cette maison appartenait déjà à Jonas Breguet, grand-père de feu son mari. C’est également en 1759 qu’elle épouse Joseph, l’un des frères Tattet, horloger et marchand de montres, aux Verrières mais possédant aussi une maison de commerce à Paris. C’est dans cette ville que la famille Tattet-Bolle s’établit en 1768.

Enfants , nés à Neuchâtel:

  • Abram-( Abraham)-Louis, 1747-1823.
  • Henry-François, 1748-1750.
  • Susanne-Marie, 1750 – ?, tous nés aux Verrières.
  • Henry, 1752 – ?
  • Henriette, née en 1753. Son traité de mariage daté du 19 septembre 1775 lorsqu’elle épouse Abram-Henry Malenjoye-dit-Savoie, du Locle, bourgeois de Valangin. C’est chez eux qu’Abram-Louis se réfugie lors de sa fuite de France en 1795.
  • Charlotte, née aux Verrières en 1756 où elle est baptisée le 10 octobre de la même année. David-Henri Petitpierre, le maire des Verrières représente le père de Charlotte à son baptême car il est absent du pays pour affaires. Charlotte restée célibataire, dirigera le ménage de son frère Abram-Louis lors de son veuvage.
  • Marie-Louise, née posthume en 1759. Elle épousera, le 12 avril 1784, David Lassueur, fils de feu Jaques, à la Chaux-Du-Moitan (Milieu).

2. Louis (II) Breguet

Louis (II) Breguet fils de Jonas Breguet. Bourgeois de Neuchâtel. Il est né en 1691, il est décédé avant 1730. Habite aux Verrières. Il épouse en 1713 Julianne Meuron, fille de Claude, de Saint Sulpy au Vaulx Travers. 

Enfants, nés aux Verrières:

  • Jonas-Claude, né en 1714
  • Susanne-Marguerite Esabeau, 1717-1729
  • Jonas Louis , 1719-1758.

3. Jonas Breguet

Jonas Breguet, fils de Louis (I) Breguet. Bourgeois de la ville de Neuchâtel. En 1710, il tient un relais aux Verrières, fournissant des chevaux au service des équipages de l’artillerie royale française. Il est hôte au «Grand Bourgeau». Jonas Breguet exploite une auberge â l’enseigne du «Cheval Blanc». Il épouse Susanne Holle des Verrières, décédé en 1711.

Enfants:

  • Susanne-Catherine, qui épousera François Tattet, du Grand Bourgeau, en 1706.
  • Anne Marguerite, née en 1687, meurt enfant Anne Marguerite, née en 1690, aussi morte bébé.
  • Louis (II) , né en 1691.
  • Henry, qui sera marchand aux Verrières et épousera en 1722 Marguerite-Judith Meuron et l’un de leurs enfants, un fils prénommé Louis (1725-1798) sera pasteur à la Chaux-de-Fonds et au moûtier du Locle; puis, un petit-fils prénommé Pierre sera maire des Verrières.
  • Susanne-Isabelle, née en 1701; en 1727 elle épouse Jean-Louis Jaccard, de Sainte-Croix.
  • Jeanne-Marie, née en 1706; elle épouse 1725 le justicier Jaques Tattet du Grand Bourgeau. Leur fils Joseph Tattet, né en 1730, épousera Susanne Marguerite née Bolle la veuve de son cousin germain Jonas-Louis Breguet. Susanne Marguerite, épousera en 1713 David Barbezat, du Grand Bayard.
  • François, illégitime; épousera en 1708 Susanne Meunier.

4. Louis (I) Breguet

Louis (I) Breguet fils de Pierre (III) Breguet. Bourgeois de la ville de Neuchâtel, 1608-1692. Consacré au Saint Ministère en 1641; pasteur à Lignières de 1642 à 1644; à Môtiers-Boveresse de 1644 à 1655, puis au Locle de 1655 à 1670 et, enfin, après sa déposition du Locle, aux Verrières jusqu’à sa mort.

Ce déplacement devait influencer les destinées de sa famille car plusieurs de ses descendants se fixèrent aux Verrières et reçurent l’indigénat. Il faut expliquer ici qu’au Locle Louis Breguet vivait en mésintelligence avec le maire et la tension entre eux entra dans une phase si aiguë que Madame la Mairaisse et Madame la Ministre «se sont entre-battues!».

En 1669, accompagné d’Etienne son fils, alors diacre à Valangin et futur pasteur de la Côte-aux-Fées, il se rendit à Paris auprès de la duchesse de Nemours princesse de Neuchâtel et de Valangin; ce voyage jugé comme une incartade par les autorités lui valut un mois de suspension de ses fonctions pastorales. Peu sociable, il eut aussi des «castilles» (disputes) avec la Vénérable Classe des pasteurs de Neuchâtel. IL a épouse NN.

Enfants

  • Estienne, pasteur.
  • Pierre, maire des Verrières
  • David, notaire, décédé en 1694.
  • Louis, décédé avant 1692.
  • Claudy, décédé en 1689.
  • Jonas , décédé en 1711.
  • Esther, née en 1644, morte en 1721; elle épouse Jaques Redard, de BellePerche Es Verrières.
  • Esabeau, baptisée en 1646.
  • Marie-Madelaine, née en 1648.
  • Samuel-Moyse, né en 1651; régent d’école à Neuchâtel.
  • Catherine, épouse Jean Lambelet, de Meudon es Verrières
  • Rose, épouse Jacques Bolle, des Verrières.
  • Marguerite, épouse Jehan Vaucher, de Fleurier.

5. Pierre (III) Breguet

Pierre (III) Breguet fils de Jehan (II) Breguet. Bourgeois de Neuchâtel; barillier. Il vend, en 1590, à Pierre Purry, un parchet de vigne au «Parchet dessous aultrement à l’Esclose sur la fontayne Saint Guillaume», à Neuchâtel. Il mourra vers 1627. Il épouse Claudaz Steiner.

Enfants , nés à Neuchâtel

  • Susanne, née en 1593; elle épouse probablement Jehan Hertin, de Neuchâtel, de la maison qui jouxte l’Oriette.
  • Jaques, né en 1596
  • Pierre dit Perrenet, né en 1599, meurt enfant
  • Anthoyne, né en 1601
  • Elisabel, née en 1602,
  • Jehan, né en 1603, décédé bébé.
  • Jehan, né en 1605.
  • Pierre, 1606-1689; maître bourgeois en 1662 ainsi qu’en 1668. Propriétaire du Fornel au Vieil Hospital. Grand Conseiller de la ville de Neuchâtel en 1639; maistre des clefs en membre du Petit Conseil en 1646. Il épouse la fille Jacob Mermoud.
  • Louis (I) , 1608-1692; pasteur.
  • Jeanne, née en 1609.
  • Barbely, Citée en 1629.

Seuls Susanne, Pierre, Louis et Barbely semblent avoir atteint l’âge adulte.

6. Jehan (II) Breguet

Jehan (II) Breguet fils de Pierre (II) Breguet. Bourgeois de la ville de Neuchâtel. En 1572, il épouse Huguenette Berthoud, fille de feu Jehan Berthod, bourgeois de Neuchâtel.

Enfants :

  • Une fille, morte avant 1614, qui avait épousé Jérémie Gallot bourgeois de Neuchâtel.
  • Marie, femme de Daniel Guynand, des Brenets; mariée avant 1620.
  • Pierre (III) , époux de Claudaz Steiner, de Neuchâtel.

7. Pierre (II) Breguet

Pierre (II) Breguet fils de Jehan (I) Breguet. Dit Pierre le vieux, bourgeois de Neuchâtel, où il décède en 1592. Il a épousé Isabelle NN.

Enfants:

  • Marguerite, qui épousera Abram Jeanfavre.
  • Blaisa, elle épouse Estienne Joly.
  • Barbely, elle épouse Guillaume Perrenet .
  • Pierre le jeune, vit en 1592.
  • Jehan (II).

8. Jehan (I) Breguet

Jehan (I) Breguet fils de Pierre (I) Breguet. Il est descendant d’un Breguet vivant à Neuchâtel, de Pierre Breguet dit Perrenet qui est cité en 1424, d’Aymê Breguet, barrelier (tonnelier), ou bien d’Othenin son frère, tous bourgeois de la ville de Neuchâtel. Jehan décédé avant 1538.

Enfants:

  • Jaquet, époux de Perrenette Socquet.
  • Pierre (II) , époux d’Isabelle NN.

Remarques

Les villes de la Chaux-de-Fonds et de Neuchâtel ont rappelé le souvenir de leur éminent concitoyen Abram-Louis Breguet en donnant son nom chacune à l’une de leurs rues.

Le patronyme neuchâtelois de Breguet est devenu, en France, Bréguet car on y prononce le premier <e> comme un <ê>