Bulletin 44 / Août 2011

Branche de la famille Roulet partie en Bretagne et en Vendée

par Pierre-Arnold Borel

Pierre Roulet, fils d’Abram et de Marie Judith Pellaton; son baptême a lieu aux Ponts-de-Martel le 7 du mois de décembre 1748; il est communier de La Sagne, des Ponts-de-Martel et de Brot; bourgeois de Valangin. Fait son apprentissage de dessinateur de modèles d’indiennes. Il est difficile de dire où Pierre fit son apprentissage de dessinateur car dans la Principauté de Neuchâtel il y avait plusieurs possibilités: soit à Cortaillod, au Bied ou à Grandchamp, où près de Boudry, aux Isles ou à Vauvillers, soit à Valangin à La  Borcarderie, chez les Borel de Bitche à Couvet. Enfin, nous le retrouvons à Nantes vers 1779 pratiquant son métier s’étant expatrié comme beaucoup d’autres compatriotes et contemporains; « …car Nantes vit, dès 1758, l’éclosion de nombreux ateliers d’impression de toiles peintes.. » Toutes les conditions nécessaires au développement de l’impression se retrouvent dans ce port breton, grâce à la présence de techniciens étrangers, suisses, allemands et hollandais, de religion réformée, attirés par des possibilités d’intégration dans ce port-franc, des débouchés importants, une eau abondante et claire, ainsi que des grands prés le long de la Loire pour étendre les toiles… » [1]

Dès 1759, Pierre, Moÿse, Jean-Frédéric et François Gorgerat bourgeois et natifs de Boudry, manufacturiers de toiles peintes ouvrent plusieurs ateliers d’indiennage à Nantes. Ferdinand Petitpierre communier de Couvet et bourgeois de Neuchâtel s’initie au métier d’indienneur à la fabrique de Couvet chez les Borel de Bitche-Bosset et Guyenet. En 1770, Petitpierre quitte la principauté, rejoint les Gorgerat à Nantes; Il y ouvre sa propre manufacture de toiles de Jouy sous la raison sociale « Petitpierre frères » après s’être associé à son frère Louis-Simon. 

Dès 1794, à Nantes, on trouve d’autres indienneurs covassons comme les frères Abram-Louis et Abram-Ferdinand Favre; ce dernier occupe durant 30 ans la charge de maire de la ville de Nantes. Une rue de cette ville porte son nom. Le musée des toileries de  Nantes, au château des ducs de Bretagne, nous permet de découvrir l’histoire de ces pionniers neuchâtelois. [2]

Pierre Roulet a travaillé comme .de nombreux autres ouvriers neuchâtelois dans une de ces manufactures.

Un document nous apprend qu’il a fait partie de la Garde Nationale de Nantes, infanterie du 2ème bataillon de la 3ème brigade, 8ème compagnie:

« nous soussignés certifions avoir donné congé absolu à Pierre Roulet sergent-major de la 8ème compagnie du 2ème bataillon de la 3ème brigade de la Garde nationale sédentaire du canton de Nantes, natif de Neufchastel en Suisse; taille 162 cm, chaveux et sourcils châtains, yeux bleus. » … « prions ceux qui sont à prier de laisser passer librement et prêter aide et assistance en cas de besoin, à notre frère et compagnon d’armes le citoyen Pierre Roulet, lequel nous a déclaré aller à Angers pour y exercer son état de dessinateur.
Fait à Nantes le 8 Messidor an XII.
Signé: Guillou capitaine
congé no. 12. »

Pierre Roulet décédera en 1812. Le 9 février 1789 il avait épousé, à bord du bateau « la Marie Elisabeth », Thérèse Gillet qui décède le 17 avril 1814.. Leurs enfants connus sont:

  • Susanne, écolière en 1798 âgée de 11 ans.
  • Justine, célibataire.
  • Virginie, célibataire; meurt vers 1864.
  • Paul, né en 1800.
  • un enfant décédé adolescent..

A propos d’un des enfants de Thérèse et de Pierre, l’Académie de Poitiers adresse une lettre datée du 7 septembre 1818 au président du Consistoire de l’Eglise réformée du département de la Vendée à Mouchamps:

« Monsieur le pasteur, j’ai reçu la lettre du 2 de ce mois par laquelle vous me demandez l’autorisation nécessaire pour qu’une école d’enseignement mutuel soit ouverte par le sieur Roulet à Mouchamps. Je suis tout disposé à accorder cette autorisation aussitôt que les formalités prescrites par l’ordonnance royale du 29 février 1816 auront été remplies.
Le sieur Roulet doit d’abord estre muni d’un brevet de capacité que je lui délivrerai lorsqu’il aura subi l’examen exigé par le Principal du Collège de Bourbon-Vendée et qu’il m’aura adressé des certificats de bonne conduite données pas les Maires et Pasteurs des communes où il a habité depuis trois ans au moins.
Lorsque Monsieur Roulet aura obtenu son brevet de capacité, une autorisation spéciale me sera demandée en sa faveur par le comité cantonal, mais comme il n’existe point de votre communion (de confession protestante) dans le département, votre demande devra être faite par une délibération du Conseil municipal revêtue de l’avis de Monsieur le sous-préfet. Voilà, Monsieur le pasteur, la marche que vous avez à suivre on dont, je regrette de ne pouvoir abréger les détails. Recevez, Monsieur le pasteur, l’assurance de ma considération très distinguée.
Le recteur de l’Académie
A. Delaliborlière

Paul Roulet fils de Pierre. Après avoir terminé ses études il occupe le poste d’instituteur à Mouchamps en Vendée. Sa femme Marguerite Briou lui donne 4 enfants:

  • Paul, lycéen; décède enfant.
  • Louis Lucien,, aussi lycéen; meurt jeune.
  • Frédéric, meurt à l’âge de 3 ans.
  • Elise, elle épousera Benjamin Sarazin, dont: Timothée et Pauline. Elise mourra le 23 novembre 1917.

Copie d’une lettre de Messieurs Deluze frères & Cie à Neuchâtel, du 6 juin 1779

Monsieur Roullet
Dessinateur dans la Fabrique de Monsieur Roth
à Nantes en Bretagne

Monsieur,
Ayant toujours vu avec peine le party que vous avés pris de quitter nôtre Fabrique ez ayant appris dans le temps de Monsieur Porchet en qui nous eûmes peut-être alors beaucoup trop de confiance, que l’envie de voyager étoit la cause de ce party, et qu’il nous seroit inutile d’entreprendre de vous engager à y renoncer, présumant que vous n’avez aucun sujet de plaintes contre nous et ayant dessein d’apporter du changement dans la direction de notre Fabrique, étant étant très mécontent de la manière dont elle est conduitte, et ne voulant pas que le Dessinateur soit sous une autre direction que la nôtre. Nous venons vous manifester le desir que nous aurions de vous voir de nouveau occuper la place de Dessinateur chez nous, et vous priier de nous apprendre le plutôt possible vôtre intention et vos conditions, qui, pour peu qu’elles soient convenables vous meriteront la préférence sur tout autre, vû la connoissance que nous avons de votre honneteté et de votre probité, et ayant l’honneur d’être très parfaitement.
Vos très nobles et très obiïssants

serviteurs Deluze Frères & Chaillet

 

Monsieur
Cet ouverture peut vs conduire à un Etablissement, puisque nous sommes décidé à nous procurer un bon coloriste et à remplacer ainsi ceux qui le sont chez nous. Notre adresse pr vous evitter l’affranchissage est à Messieurs Deluze frères & Chaillet 
chez Monsieur Junet Directeur des Postes Pontarlier en Franche Comté

Expéditeur Deluz frères & Chaliet
Adressée à Monsieur Roulet
Dessinateur, en Grand Biais, sur les Ponts à Nantes, en Bretagne

Monsieur
Quoy qu’incertain si nos propositions viendront à temps pour vous trouver libre vû les circonstances ou vous vous trouvés annoncées dans votre lettre du 26è du passé, nous ne laissons pas que dè vous les faire passer cy inclus, en vous disant que c’est tout ce que nous pouvons faire de mieux et qu’elles nous sont dictées par l’estime que vous avons voué et le cas que nous faisons de vos talents et de votre empressement à les rendre utiles par des soings aussi assidus qu’intelligents.
Le traité que nous ferons ensemble sera pour quatre années consécutives qui commenceront à votre arrivée chez nous pour travailler. 
Vous accuperez dès la St-Jean prochaine l’appartement de la Grange consistant en une cuisine dépense ou chambre à côté avec le poil à plein pied une chambre au dessus avec l’antichambre, pendant le restant du terme de notre traitté et en attendant vous pourriés
avoir la chambre que vous occupiés à vôtre départ.
Plus la moitié du jardin à cotté de la dite Grange et le bois nécessaire pour votre Ménage, sans abus.
Nous nous engagerons de vous payer en outre
Pour la première année fraix de voyage compris 80 Louis
Pour la 2ème année 80 L.
Pour la 3ème année 85 L.
Pour la 4ème année 90 L
335 L pour les quatre années.

On s’engagera de s’avertir reciproquement à la fin de la troisème année de ses intentions pour la suitte.

Comme il nous importe de savoir au plustôt vôtre resolution, nous vous prions de nous la faire passer incessamment et demanière que nous l’ayons vers le 10 Aoust
Nous avons l’honneur d’ètre avec un sincère attachement.
Monsieur vos très humbles et très obéïssants serviteurs.
Deluze Frères et Chaillet
chez Monsieur Junet, directeur des Postes à Pontarlier en Franche Comté

Copie d’un manuscrit daté de novembre 1793

L’honorable Communauté des Ponts-de-Martel, dans la principauté de Neuchâtel et Valangin en Suisse, ayant été aujourd’huy sous date, convoquée et assemblée, dans son Temple, après le Service divin, sous la présidence requise, pour l’absence de Monsieur de Pierre, Maire de ce lieu; Requisition lui a été faite, de la par du Sieur Pierre fils de feu le Sieur Abram Roulet, de La Sagne, qui étoit Conseiller de Commune des dits Ponts-de-Martel et bourgeois de Valangin, de vouloir faire expédier, audit Sieur Pierre Roulet, demeurant à Nantes en Brêtagne un témoignage et acte en due forme, d’origine et de reconnoissance de ommunier des dits Ponts.
Sur laquelle requisition, les voix et les suffrages, en ayant été demandé, aux Justiciers, Conseillers, officiers et autres membres de ladie Commune; Lesquels ont unanimement accordé la demande dudit Sieur Pierre Roulet, en Déclarant qu’il est né en Loyal Mariage,
rière les dits Ponts de Martel, ïçu dudit Sieur Ancien et Conseiller Abram qu’étoit fils de feu le Sieur Ancien Abram Roulet, qui furent toûjours considéré, de même que le requérant, pour être Gens de bien, d’honeur, de probité et d’une conduite irréprochables.
Tellement que ledit Sieur Pierre Roulet et ses descendants en Loyal Mariage, pourront quand ils le trouveront convenable, se repatrier et jouïr de leurs droits de Communauté de ce lieu, sans empèchement, en se comportant toujours loyalement.
Cette déclaration a ainsi été agréablement accordée, par ladie Honorale Communauté: le Justicier et Notaire Juré sous-signé Secrétaire de ladite Commune des Ponts-de-Martel, Etant chargé d’en faire la présente Expédition, qui est ainsi donnée sous la Signature Notariale et ordinaire et la Cachet de ses armes.

Aux Ponts-de-Martel le 24è de Novembre 1793
F. Sandoz, Juré Notaire

Notes

  1. texte tiré de l’ouvrage « Les toiles de Nantes, des XVIIIème et XIXème siècles » édition du Musée des Arts décoratifs, château des ducs de Bretagne., Nantes 1978
  2. tiré de l’ouvrage « Livre de raison et chronique de famille de David Frédéric Gorgerat bourgeois de Boudty » par J. et P.-A.Borel 1987.