Bulletin 30 / Décembre 2006

Les sujets de l'Etat

Question 2006 Q 13

de Mme Freyss-Béguin, de Paris

Que signifie « sujet de l’Etat » ?

Réponse 2006 R 13

Réponse de Germain Hausmann

Avant 1848, la procédure de naturalisation se passait dans le sens contraire de ce qui se fait d’aujourd’hui, c’est à dire que le futur Neuchâtelois demandait d’abord la naturalisation de l’Etat de Neuchâtel. Une fois celle-ci obtenue, il devait trouver une commune qui voulait bien l’accepter. Cette quête n’était pas facile, car presque toutes les communes étaient totalement fermée et n’acceptaient aucun nouveau membre. C’est ainsi que beaucoup de personnes sont restées neuchâteloises, mais sans commune. On les a appelés « sujet de l’Etat« .

Les personnes sans commune d’origine se répartissaient en plusieurs catégories :

  • il y avait les « heimatlos » au sens strict (ce que nous appellerions aujourd’hui des apatrides). Aucun Etat ne les reconnaît comme ses ressortissants.
  • il y avait les « descendants d’huguenots« , qui avaient été reçus dans des conditions spécifiques dès 1707. En fait, on leur avait délivré des papiers qui leur servaient pour poursuivre leur route en direction de la Prusse. Mais certains sont restés chez nous et avaient ce statut intermédiaire.
  • il y avait les « sujets de l’Etat » que l’on peut diviser en 3 groupes :
    • 1. les descendants illégitimes de Neuchâtelois.
    • 2a. les naturalisés par l’Etat qui n’avaient pu ou voulu acquérir une commune d’origine. Si c’étaient des personnes d’origine étrangère, elles n’étaient que sujets de l’Etat.
    • 2b. Idem. Si c’étaient des personnes d’origine suisse, elles étaient sujets de l’Etat et originaires d’une commune d’un autre canton.

En 1863, tous les heimatlos et sujets de l’Etat ont été répartis dans les communes neuchâteloise, sauf ceux de la dernière catégorie (la catégorie 2b).

Il faut comprendre que les communes n’étaient pas très enthousiastes à l’idée d’augmenter le nombre de leurs ressortissants (et de leurs assistés éventuels). Aussi, on a considéré que les personnes qui faisaient partie de cette catégorie 2b étaient suffisamment
« couvertes » en ayant déjà une commune d’origine et qu’il était inutile de leur en donner une deuxième, neuchâteloise. Ils sont donc restés sujets de l’Etat de Neuchâtel jusque dans les années 1954, où leur statut, extraordinaire, a commencé à déranger. Ils ont alors été « donnés » à la commune de Neuchâtel.

Pour conclure, rappelons qu’en Suisse il n’existe pas de nationalité suisse stricto sensu. Chacun est ressortissant d’un canton et c’est le fait qu’il soit Neuchâtelois, Vaudois, Bernois, etc. qui le fait appartenir à la Suisse.