Bulletin 10 / Février 1998

Tombes de Colombier

Description des tombes de l'ancien temple de Colombier

par Germain Hausmann
 
Sources : AE Neuchâtel, Manuel de Justice, n° 23 : registre civil et seigneurial de la Justice de Colombier, commencé le 23 septembre 1818 et terminé à la date du 28 octobre 1831, p. 745-750.

Lors d’une recherche généalogique nous avons trouvé dans un registre de Justice de Colombier le texte suivant qu’il nous a paru intéressant de publier:

[p. 745]
« Procès-verbal de la levée des tombes »
« et exhumation des ossements des corps ensevelis »
« dans l’ancien temple de Colombier »
« du 4e juin mil huit cent vingt-huit »

« Aujourd’hui, quatrième juin de l’année mil huit cent vingt-huit, s’agissant de faire l’ouverture des tombes renfermées dans l’enceinte du temple de Colombier et de procéder à la translation dans le cimetière des ossements qu’elles renferment, translation qui doit précéder la démolition dudit temple, le Conseil d’Etat, sur la direction qui lui a été demandée par l’honorable Communauté de Colombier, ayant chargé noble et vertueux César D’IVERNOIS, conseiller d’Etat et maire en cette juridiction pour Sa Majesté le Roi de Prusse, notre souverain prince et seigneur, de pourvoir à ce que la translation de ces ossements se fît avec décence, mais sans aucune espèce de cérémonie, il a nommé le sieur Jean Henri CLAUDON, membre de la Cour de justice de ce lieu, pour porter présence à cette translation de même qu’à l’ouverture des tombes et il l’a chargé de représenter le gouvernement dans cette occasion. »

« En conséquence, ledit jour, dès les huit heures du matin, mondit sieur CLAUDON, accompagné du greffier soussigné pour dresser procès-verbal de cette opération et du sautier François Louis BOREL se sont rencontrés dans le temple après s’être adjoints deux ouvriers pour faire les fouilles, savoir les nommés Josué VUITHlER et Jonas MIEVILLE. »

« De la part de l’honorable Communauté de Colombier, les sieurs [p. 746] Henri JOUX et Samuel MOREL, modernes gouverneurs, s’y sont aussi rencontrés. »

« Monsieur George DE CHAILLET, conseiller d’Etat, ayant manifesté le désir que l’on commençât l’opération par les deux tombes sous les n° 1 et 2 où reposoient des parens de sa famille, c’est ce qui a eu lieu en sa présence; et il ne s’est trouvé dans l’une et l’autre que les ossements d’un seul corps, quoique l’inscription du n° 1 fût de nature à faire entendre que cette tombe renfermoit deux corps, en observant quant au n° 2 que cette tombe parraissait avoir été fouillée par ci-devant, vu que les ossements en étaient dispersés. »

« Inscription gravée sur la pierre qui recouvroit la tombe n° 1, la première dans la nef, du côté du choeur. Voyez le tableau annexé au verbal: « 

« Nobiles conjuges, »
« Abrahamus Chailletus, »
« majoris ditionis La Coste, »
« et »
« Margaretha Bariller, »
« pio conjugio per 48 annos juncti, »
« morte disjoncti : hic rejuncti, aeternam »
« cum Christo conjunctionem »
« expectant. »
« Obiit illa prior XIII apr. anno MDCLXXIV, »
« aetate 68 mens. 4, »
« ille secutus XXIII januar anno MDCLXXXV, »
« aetate 80 mens. 3 die 12. »

[Cf. traduction à la fin de l’article]

« Inscription du n° 2 « 

« ICY GIT LE CORPS »
« DE NOBLE »
« IEAN HENRI »
« CHAILLET, »
« MAIRE DE LA COTE »
« et Conseiller d’Etat »
« DE S.A.S., »
« Décédé le Xouj [?] d’Octobre »
« MDCLXXXEX, »
« Aagé de LXIIII ans. »

[p. 747] « Inscription n° 3 « 

« YCY GIT LE CORPS »
« de……………[blanc dans le texte] et vertueux »
« FELIX THOMASSET, »
« de Colombier, bourgeois »
« de la Ville de Neufchâtel, »
« LIEUTENANT pour S.A.S. »
« en la Justice dudit Colombier, »
« Décédé le 21 de Novembre »
« MDCLXXXVIII, »
« Aagé de LXIIII ans »

« L’on a trouvé dans la fosse du n° 3 ci-dessus quelques ossements, mais d’une personne seulement. »

« En levant une pierre qui recouvroit une petite porte pratiquée dans le mur du côté du Nord du choeur et près de la tombe n° 3, il s’est trouvé une pierre en forme de piédestal peinte en fresque de différentes couleurs portant une inscription en lettres gothiques de couleur blanche sur un fond rouge. »

« n° 4 »

« L’on a apperçu aucune trace d’inscription sur cette tombe qui est en pierre jaune, mais seulement des armoiries en relief qui sont deux haches d’arme placées en croix dans un écusson, le tout déjà un peu effacé. » [sans doute les armes de la famille D’ACHEY, dont un membre fut seigneur de Colombier]

« En fouillant, il s’est trouvé quelques ossements d’une personne seulement. »

« n° 5 au devant de la chaire »

« L’on n’a apperçu aucune trace d’inscription sur la pierre de cette tombe qui est en pierre jaune. Les armoiries qui y fïguroient paraissent avoir été piquées. Trouvé en fouillant les ossements d’un corps seulement. »

« n° 6 »

« La pierre porte les armoiries de Colombier; elle a été entaillée environ la moitié de sa largeur pour recevoir l’un des piliers de la Salle de communion; à l’un des bouts existe la place où il y avoit précédemment une boucle pour la lever. »

[p. 748] « Elle ne porte d’ailleurs aucune inscription. »

« L’on a trouvé en fouillant dans cette tombe les ossements d’un seul corps à environ 4 pieds de profondeur et, au dessus, étoit placée une épée de forme antique avec quelques fragments de maroquin qui paraissent être les débris du ceinturon et un éperon. »

« n° 7 »

« Dans le haut de la pierre, on distingue des armoiries qui se composent d’un scorpion dans un écusson en relief [armoiries de la famille GUINAND] et, plus bas, cette inscription : »

[Le texte fait le tour de la pierre, tout d’abord à droite] « PIERRE GUYNAND, BOURGEOIS DE NEUCHÂTEL ET VALANGIN, LIEUTENANT » [puis au bas] « ET RECEVEUR DE COLOMBIER, » [puis à gauche] « MORT ESTANT MAYRE S: A: Sér. AUX BRENETS, » [enfin au milieu] :

« DECET.. [blanc] DE »
« NOVEMBRE 1673, »
« AGÉ DE 60 ANS »
« ET CINQ MOIS, LAISSANT »
« POUR SA VEUFVE »
« DAMOISELLE »
« Salomé Hory »

« Dans la tombe n° 7 ci-dessus, l’on a trouvé en fouillant un corps à une grande profondeur, tourné au levant et dans la direction de l’église. »

« n° 8 »

« Nulle inscription quelconque sur la pierre, mais seulement les armoiries de la maison de Colombier et un écusson et une croix en sautoir, le tout en [p. 749] relief sur pierre jaune. »

« Trouvé les ossements d’un corps tourné au levant d’une dimension extrêmement forte. »

« n° 9 »

« Sans aucune inscription sur la pierre qui est en deux morceaux; l’on a trouvé en fouillant quelques ossements d’une personne. »

« n° 10 »

« L’inscription et les armoiries qui paraissent avoir existé sur la pierre ont été piquées; trouvé en fouillant les ossements d’un corps, »

« n° 11 »

« Cette tombe est recouverte par une pierre jaune, sur laquelle il paroît que les armoiries ont été piquées et où l’on apperçoit aucune inscription; trouvé les ossements d’un corps. »

« n° 12 »

« Cette tombe est aussi recouverte d’une pierre jaune sur laquelle on n’apperçoit aucune trace d’inscription ni d’armoiries. « 

« NB. : Dans ces trois dernières tombes, les corps paraissent avoir été mêlés. »

« Inscription n° 13 »

« Depositum »
« SAMUELIS TRIBOLETI, »
« Badensibus quondam praefecti »
« Js, [?] posteaquam patriae suae bono »
« acerrimam mentem consecrasset »
« quod cives olim Rrm Pblm optimi »
« fatum e expert [?] ne frustra semper »
« eorum exemplo eorum vixisset. Im »
« secundis non erat elatus, nec »
« dejectus in adversis, memor »
« mundana non esse nissi vana. »
« Viduam reliquit pientissimam »
« Ursulam a Graffenried, exqua »
« superstites filii II, IVque filiae. »
« Obiit épochae nostra anno 1673, »
« annos cum numerasset 54. »
« Bene de eo sperale cujus sola »
« spet fuit Christus. »

[cf. traduction donnée pages suivantes]

[p. 750] « n° 14 »

« Aucune inscription ni armoiries »

« n° 15 » 

« Pierre en roc marbré au haut de laquelle sont gravées des armoiries et, plus bas, cette inscription : »

« Iici gît le corps de noble Jonas »
« De Montmollin, Receveur »
« pour S:A:S: à Colombier, »
« décédé le vingt-unième Jour de »
« Juin, l’an 1676, âgé de 33. ans »

« n° 16 »

« Aucune trace d’inscription »

« n° 17

« On remarque sur cette pierre quelques vestiges d’inscription et d’une légende tellement effacés qu’ils sont indéchiffrables; dans cette tombe, il s’est trouvé les ossements de deux corps tournés en cens [sic] contraire. »

« Les fouilles étant terminées, tous les ossements qui ont été retirés des tombes ci-devant mentionnées ont été placés dans une grande bière préparée à cet usage, et ensuite conduits avec ordre et décence dans une fosse du cimetière de la Commune, et cela, en présence de mondit sieur le justicier CLAUDON, des sieurs Henry JOUX et Samuel MOREL, modernes gouverneurs, du greffier et du sautier. »

« Et, quant à l’épée et autres objets trouvés dans les tombes, ils ont été provisoirement déposés au greffe. »

 

Dans l’article de Louis BOREL, «Notice sur Colombier », dans Musée neuchâtelois 1876, p. 200 et 201, on trouve les traductions suivantes des inscriptions nos 1 et 13 :

« Les nobles époux, »
« Abraham Chaillet, »
« maire de La Côte, »
« et »
« Marguerite Barillier, »
« unis en pieux mariage pendant 48 ans, »
« séparés par la mort, ici rejoints, »
« attendent la réunion éternelle »
« avec Christ. »
« Elle mourut la première le 23 avril 1674 »
« à l’âge de 68 ans 4 mois. »
« Il suivit le 23 janvier 1685 »
« à l’âge de 80 ans 3 mois et 12 jours. »

« Ici repose »
« Samuel Tribolet, »
« autrefois bailli de Baden »
« Après qu’il eut consacré son esprit »
« très ardent au bien de sa patrie, »
« il éprouva ce qu’ont éprouvé »
« autrefois les meilleurs citoyens des républiques -« 
« afin qu’il tirât profit de leur exemple. »
 « Il ne fut point enorgueilli dans la prospérité, ni »
« abattu dans l’adversité, »
« se souvenant que les choses de ce monde ne sont que vanité, »
« Il laissa une veuve très pieuse, »
« Ursule de Graffenried, dont »
« lui survécut deux fils et quatre filles. »
« Il mourut l’an 1673 de notre ère, »
« à l’âge de 54 ans. »
« Espérez bien de celui dont »
« le Christ fut la seule espérance. »