Bulletin 14 / Eté 2000

La vie de Jonas Favre

La vie de Jonas Favre, communier de Couvet

par P.-A. Borel, selon les recherches d'Alfred Schnegg

Un mot d’introduction va nous permettre cependant de fixer quelques jalons biographiques. Issu d’une famille fixée à Couvet, au Val-de-Travers, Jonas Favre doit être né vers 1630. Comme beaucoup de ses compatriotes – le Val-de-Travers à cette époque est la terre d’élection des maçons – il mena sans doute quelques années durant la vie errante des compagnons et roula sa bosse loin de sa vallée natale. Il dut séjourner en France, car dans un procès débattu en 1685, au sujet de malfaçons dans un bâtiment, il préconise, à titre d’expert, l’établissement de « canaux de pierre pour recevoir l’eau, comme cela se pratique en France et ailleurs ». Devenu bourgeois de Neuchâtel, en 1665, il s’établit dans cette ville qu’il quitte d’ailleurs à maintes reprises pour suivre ses travaux. Il y meurt en 1694, laissant de sa femme, Catherine Dumeurier, bourgeoise de Grandson, deux filles. Voici en quels termes le théologien Jean-Frédéric Ostervald, pasteur de Neuchâtel, décrit la fin de l’architecte:

1694. Le 26 janvier on ensevelit le Sieur Jonas Favre architecte, qui ayant la gangrene au genou s’étoit fait couper la cuisse le jour précèdent. Il mourut… après l’opération, les chirurgiens mal adroits n’ayant pas pris leurs mesures pour étancher le sang. J’assistai à l’opération et à la mort du patient qui était mon compère, et j’avertis les chirurgiens de mieux pourvoir à l’étanchement du sang que par une compresse avec des stipliques, et cela avant l’opération.

Ostervald, dans son JOURNAL que nous citons ici, n’est pas si abondant, malheureusement, s’agissant de l’activité professionnelle de son « compère ». C’est donc aux actes notariés que nous recourrons désormais pour énumérer les principales étapes de la carrière de Jonas Favre.

1658-1660 : Travaux d’agrandissement et d’aménagement au temple de Couvet.
1660 : Construction de la maison Prince-dit-Clottu, à Saint-Blaise (actuellement: Charles Perrier).
1663 : Construction du « cabinet » du Donjon, à Neuchâtel (probablement l’orangerie, disparue lors des travaux d’aplanissement, vers 1870).
1664 : Exécution du griffon de pierre dressé sur une colonne, à la fontaine de la rue du Pommier, à Neuchâtel.
Construction de la plate-forme de la maison Tribolet, sur la place des Halles (actuellement No. 13).
Exécution d’un plan du château de Valangin.
1666 : Reconstruction du temple de Serrières.
1666-1667 : Rénovation intérieure du temple de Saint-Blaise.
1668 : Construction de sa propre maison, « Sur les Graviers » (plus tard: hôtel du Vaisseau, maison démolie en 1926).
1668-1669 : Reconstruction du clocher du temple de Môtiers.
1669 : Travaux exécutés au nouveau château de Oberdiessbach, pour la famille de Watteville.
Vers 1671 : Travaux au port de Grandson.
1673 : Exécution d’une maquette pour la reconstruction prévue de l’hôpital d’Yverdon.
1674 : Travaux au port de Neuchâtel.
Reconstruction de la voûte de la Sorge, sur laquelle repose le choeur du temple de Valangin.
1679 : Aménagement de la glacière du donjon de Neuchâtel (comblée probablement lors des travaux de 1870).
1682 : Construction de l’ancienne maison de commune de Couvet.
1685 : Plan d’alignement de la rangée méridionale de la rue du Coq d’Inde, à Neuchâtel.
1686 : Construction de la maison de l’Arsenal, à Neuchâtel (rue du Temple-Neuf, No 11; maison démolie en 1952).
1686-1687 : Travaux de transformation à la Collégiale de Neuchâtel (effacés lors de la restauration de 1867-1870).
1697 : Construction de la maison Henry Petitpierre, à la rue de l’Hôpital, à Neuchâtel (aujourd’hui No. 7).
1687-1688 : Construction de la ferme des Pradières, pour le chancelier Georges de Montmollin (aujourd’hui restaurant des Pradières, commune des Geneveys-sur-Coffrane).
1689-1691 : Construction du temple de Villars-le-Grand, sur les plans de l’architecte bernois Samuel Jenner.
1690 : Exécution des plans de la maison Villardin, à Moudon (nous n’avons pas identifié cette construction).
1691 : Reconstruction à Cottard de la maison du colonel Sturler, bailli de Lausanne (actuellement maison Marcuard).

Neuchâtel, avril 1954

Alfred Schnegg, archiviste

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