Bulletin 57 / Décembre 2017

1872, Accident de chemin de fer à Colombier

Le 22 Mars, un épouvantable accident a eu lieu à la gare de Colombier. Un train d’environ 1000 internés que l’on rapatriait en France, rencontra vers 9 heures du soir, par suite d’une fausse aiguille, un wagon vide placé en avant d’un convoi stationnaire de houille. Le wagon vide fut lancé et écrasé contre les wagons de houille par le train qui arrivait. Le choc fut terrible: le premier wagon d’internés vint se briser contre le fourgon de marchandises, le second, broyé par le choc, grimpa sur le premier, ce fut un moment affreux! les  malheureux internés essayant de sortir des premiers wagons furent écrasés, et, quand les wagons grimpèrent les uns sur les autres, on en vit qui, incapables de s’échapper, furent broyés par ces masses qui se précipitaient les unes contre les autres. Les blessés jetaient des cris déchirants auxquels répondaient les cris d’angoisse de leurs camarades. L’obscurité ajoutait encore à l’horreur du moment. Mais bientôt des secours s’organisèrent: une compagnie de soldats détachée et des particuliers de Colombier commencèrent à déblayer la place et à sortir les blessés de leur affreuse position. Le sauvetage était rendu très difficile, parce que beaucoup de ces malheureux avaient les membres pris entre des débris des wagons, et qu’on ne pouvait les enlever sans leur occasionner de terribles souffrances. Au bout de 2 heures cependant cette lugubre besogne fut terminée. On achemina les blessés sur l’infirmerie et les morts furent transportés au manège. Les médecins de la ville se hâtèrent de partir pour Colombier, car la tâche était grande: il n’y avait pas moins de 72 blessés à soigner. Dès le lendemain, de grands chars de déménagement amenaient à Neuchâtel les blessés en état de supporter le transport. Quant aux 22 morts, ils furent solennellement enterrés à Colombier, le samedi suivant, en présence d’un public nombreux et recueilli. Parmi les morts se trouvait le chef de train, un jeune Reutling, de Zurich; c’est le seul Suisse qui ait été atteint par cet affreux accident, les carabiniers soleurois qui formaient l’escorte ont tous été heureusement préservés, s’étant trouvés tous placés, par suite d’un retard, dans les derniers wagons du convoi.

Source

Le véritable Messager boiteux de Neuchâtel pour l'an de grâce 1872, p.34-35